Un homme de raison
Le samedi 14 septembre nous avons eu la tristesse de perdre notre camarade Philippe Dementen.
C’était un « honnête homme », un homme de raison. Il refusait toutes les injustices et les oppressions. La fraternité était son étendard. Il refusait tous les dogmes, c’était un libre penseur jusqu’au tréfonds de lui.
Philippe Dementen, un militant ouvrier
Il avait été ouvrier un temps, comme chauffeur de taxi, puis éducateur.
Militant syndicaliste, il se battait pour un syndicalisme libre et indépendant de tout parti, de toute institution. Avec lui, ce fut plus d’un demi-siècle de militantisme organisé et assidu.
En tant que fonctionnaire, il fut aux avant-postes de tous les combats pour la défense inconditionnelle de la Sécurité Sociale, de l’Ecole Publique et plus généralement des services publics. Mais aussi, il considérait que c’était là une nécessité démocratique et d’égalité entre tous les travailleurs, tous secteurs confondus, public et privé. Il souscrivait à l’idée de Marx selon laquelle Sécurité Sociale et services publics peuvent être des bastions prolétariens.
Chacun se souviendra aussi de son attachement profond à l’indépendance de son organisation syndicale, la FGTB. Il y déployait toute son énergie notamment pour s’opposer à ce que son syndicat ne devienne cogestionnaire du système. Dès le début de sa vie professionnelle il était devenu délégué et tout au long de sa vie syndicale, sur son lieu de travail, comme dans les instances, où il eut plusieurs fois une action déterminante, il rappelait toujours aux travailleurs, leurs intérêts propres et particuliers. Comme il disait, dans les négociations, il n’était pas pour les tables rondes, mais pour les « tables carrées » ! Défendant la lutte des classes et ayant choisi son camp, il était un adversaire résolu de la Doctrine sociale de l’Eglise, qui nie la réalité des classes sociales.
Internationaliste convaincu, il adhère très tôt à le IVème internationale et s’investit intensément dans la section belge. Considérant que « la lutte de classe est nationale dans ses formes et internationale dans son contenu » il mènera ses combats en ce sens.Veillant constamment à ne pas mélanger cadre syndical et cadre politique, il a toujours poursuivi la volonté de réaliser l’unité des travailleurs dans l’action au-delà de leurs sensibilités politiques particulières.
Philippe Dementen, un libre penseur
Philippe Dementen a été et restera fondamentalement un homme de Raison.
Esprit ouvert et curieux, grand lecteur, il invitait sans cesse à s’informer et à se cultiver, en vue de pratiquer le nécessaire débat sur un plan rationnel.
C’est donc à juste titre qu’il se proclamait libre penseur. Humaniste aussi, il adhérait à la pensée de Protagoras, « l’homme est la mesure de toutes choses ».
Il ne fut pas un intellectuel de salon. Il a toujours estimé que les positions d’un individu ou d’un groupe d’individus n’ont de force et ne deviennent opérantes qu’au travers d’une organisation.
Joignant la pensée à l’action, désireux de rassembler tous ceux qui en Belgique, voulaient promouvoir la Libre Pensée et la défense réelle de la laïcité, il fut un des fondateurs du Cercle de Libre Pensée-Kring voor het Vrije Denken (CLP-KVD). Il en fut un moment président jusqu’à ce que ses ennuis de santé ne l’amènent à devoir réduire ses activités. Il avait été par ailleurs, un des premiers signataires du Manifeste pour la Liberté de conscience, adopté à Oslo lors de la fondation de l’Association internationale de la Libre Pensée, le 10 août 2011.
Chacun, au sein du CLP-KVD, se souviendra combien Philippe Dementen, fidèle à ses habitudes, revenait souvent sur les principes fondamentaux de la libre pensée. Sur la laïcité par exemple : totale liberté de conscience, liberté de croire ou de ne pas croire, liberté de pratiquer et d’exprimer ses positions ou croyances, mais aussi fonds publics à l’Ecole Publique, fonds privés à l’école privée, et, fondement de la laïcité, séparation des Eglises et de l’Etat. Il ne manquait jamais d’intervenir dans les débats, y exposant ses réflexions, affirmant ses convictions, fermement, passionnément, mais toujours avec courtoisie.
Il souscrivait à la pensée de Jaurès selon laquelle « le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage ». Pacifiste donc, il eut particulièrement à cœur de s’investir, dans la campagne internationale pour la « réhabilitation collectives des fusillés pour l’exemple » lors de la guerre de 14-18, menée par le CLP-KVD. Une fois encore, il ne manqua pas de rappeler l’importance de développer cette campagne de manière unitaire en Belgique, au Nord et au Sud du pays.
Héritier d’Epicure, de Condorcet et de Marx, Philippe Dementen aura contribué, à sa mesure d’« honnête homme » au combat des Lumières contre l’obscurantisme, au combat pour l’émancipation de l’humanité.
Salut et Fraternité, Philippe.
Le comité du CLP-KVD
Bruxelles, le 18 septembre 2019
Texte de Khalil Gibran envoyé par Lucien Cambie
Et une femme qui portait un enfant dans les bras dit,
Parlez-nous des Enfants.
Et il dit : Vos enfants ne sont pas vos enfants.
Ils sont les fils et les filles de l’appel de la Vie à elle-même,
Ils viennent à travers vous mais non de vous.
Et bien qu’ils soient avec vous, ils ne vous appartiennent pas.
Vous pouvez leur donner votre amour mais non point vos pensées,
Car ils ont leurs propres pensées.
Vous pouvez accueillir leurs corps mais pas leurs âmes,
Car leurs âmes habitent la maison de demain, que vous ne pouvez visiter,
pas même dans vos rêves.
Vous pouvez vous efforcer d’être comme eux,
mais ne tentez pas de les faire comme vous.
Car la vie ne va pas en arrière, ni ne s’attarde avec hier.
Vous êtes les arcs par qui vos enfants, comme des flèches vivantes, sont projetés.
L’Archer voit le but sur le chemin de l’infini, et Il vous tend de Sa puissance pour que Ses flèches puissent voler vite et loin.
Que votre tension par la main de l’Archer soit pour la joie;
Car de même qu’Il aime la flèche qui vole, Il aime l’arc qui est stable.
(extrait du recueil Le Prophète)
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