Source La Raison : La Cour suprême a examiné, le 4 mars, une loi de Louisiane visant à restreindre l’accès à l’avortement1. La décision devrait être rendue en juin, en pleine campagne présidentielle. Lors du discours sur l’état de l’Union, le 5 février 2019, Donald Trump avait mentionné l’avortement, pour la première fois dans ce cadre depuis son arrivée à la Maison Blanche. Il attaquait frontalement une loi adoptée par l’État de New-York, qui dépénalise les avortements au troisième trimestre, quand la grossesse menace la santé de la mère ou quand l’enfant n’est pas viable, appelant le Congrès à agir : « Pour défendre la dignité de chaque personne, je demande au Congrès de voter une loi interdisant les avortements tardifs », déclarait-il.
En pratique, les avortements tardifs sont très rares. Selon le Centre de contrôle et de prévention des maladies, qui dépend du ministère américain de la santé, plus de 90 % des IVG pratiquées en 2015 ont eu lieu avant 13 semaines de grossesse, et seul 1,3 % après 21 semaines.
En janvier 1973, les juges de la Cour suprême, à l’occasion du célèbre arrêt ont établi qu’une femme avait le droit de décider d’avorter, avant la viabilité du fœtus2. Cet arrêt, pris à une forte majorité – 7 voix contre 2 – s’appuie sur le 14e amendement de la Constitution, qui stipule qu’un État ne peut priver « une personne de sa liberté sans procédure légale régulière ». Compte tenu de cette lecture de la Constitution – une femme doit être libre de décider – ni le Congrès à Washington, ni les États ne peuvent aujourd’hui revenir sur l’IVG. En revanche, les États ont une marge de manœuvre pour définir les conditions de sa pratique, la santé étant de leur ressort.
Ainsi, en 2014, la Louisiane a décidé d’imposer aux médecins pratiquant des interruptions volontaires de grossesse (IVG), dans des centres prévus à cet effet, d’avoir une autorisation d’exercer dans un hôpital situé à moins de 50 kilomètres du lieu de l’opération. Une mesure nécessaire, selon les autorités locales, pour pouvoir transférer les patientes dans des hôpitaux voisins en cas de complication. Pour les défenseurs du droit à l’IVG, ces conditions sont en effet trop drastiques : seul un médecin et une clinique pourraient continuer à exercer dans toute la Louisiane, assurent-ils, en cas d’application de la loi. Un nombre insuffisant pour les quelque 10 000 avortements pratiqués chaque année dans cet État.
Bien évidemment la rhétorique bigote et cléricale n’est jamais éloignée des préoccupations de bien des législateurs. Ainsi, la Sénatrice Démocrate au Sénat de Louisiane à Bâton-Rouge, Katrina Jackson (D-Monroe), a déclaré que la fin de l’IVG légale « viendrait par la prière, par l’intervention du peuple rassemblé » affirmant : « Ce n’est plus une question partisane, c’est un problème de Dieu, c’est une question pour les États-Unis ». Ajoutant : « Mon but dans mon mandat est de me tenir aux côtés de Dieu. Ma préoccupation première est de ne pas offenser Dieu… »
_______________________________
Notes :
1. Cf. « L’IVG de nouveau devant la Cour suprême » in La Raison, n°647, janvier 2020.
2. « Le droit à l’IVG dans l’œil du cyclone aux États-Unis », La Raison, n°644, septembre 2019.
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.