Le militarisme, « c’est l’élimination de la pensée et de la volonté personnelle, la transformation de l’homme en un robot mis en mouvement et dirigé de l’extérieur pour exécuter aveuglement les ordres, sans qu’il se sente responsable de ses propres actes. En un mot : le militarisme est la forme la plus vicieuse et la plus condamnable de la servilité élevée au rang de vertu nationale, qui méprise toutes les règles de la raison et se trouve dépourvue de la moindre dignité humaine. » Rudolf Rocker
Amis, Citoyens, Compagnons, Camarades,
Nous, Libres Penseurs, Libres Penseuses, comme tous les 11 novembre depuis plusieurs années, célébrons non pas la Victoire, mais la Paix.
La Grande guerre, qualifiée d’industrielle, a marqué une nouvelle étape dans la barbarie : le massacre de masse. Elle dura 4 années, mobilisa 70 millions d’hommes dans le monde, fit 8 millions de morts, 20 millions de blessés, occasionna la destruction de villages, de villes, mais aussi des ravages moraux et psychiques pour des millions de parents, de femmes, d’enfants qui ne reverront jamais leur fils, leur mari, leur compagnon, leur père.
Et pourtant des voix s’étaient élevées pour rappeler que « Toute guerre n’est qu’un attentat contre la classe ouvrière, elle est un moyen sanglant et terrible de diversion à ses revendications. ». Des pacifistes et notamment les libres penseurs – qui certes n’auront pas un avis unanime – partageront tous l’idée que la guerre est une hérésie et ne règle aucun problème. Bien mieux la guerre appelle la guerre, avilit l’homme, détruit la civilisation et asservit les peuples !
Qui peut dire que les paroles suivantes ne font pas écho à notre actualité ?
Jaurès qui déclarait à l’aube de la guerre : « Quoi qu’il en soit, citoyens, et je dis ces choses avec une sorte de désespoir, il n’y a plus, au moment où nous sommes menacés de meurtre et de sauvagerie, qu’une chance pour le maintien de la paix et le salut de la civilisation, c’est que le prolétariat rassemble toutes ses forces qui compte un grand nombre de frères, Français, Anglais, Allemands, Italiens, Russes, et que nous demandions à ces milliers d’hommes de s’unir pour que le battement unanime de leurs cœurs écarte l’horrible cauchemar. » Jean Jaurès paiera de sa vie cet appel au pacifisme, assassiné pour l’exemple parce qu’il fallait mettre les peuples au pas.
Qui peut dire que les paroles suivantes ne font pas écho à notre actualité ?
Le Manifeste de Zimmerwald « Les institutions du régime capitaliste qui disposent du sort des peuples, les gouvernements (monarchiques ou républicains) la diplomatie secrète, les puissantes organisations patronales, les partis bourgeois, la presse capitaliste, l’Église – sur elles repose toute la responsabilité de cette guerre, surgit d’un ordre qui les nourrit. » ou le Manifeste de Kienthal de 1916 « Ni vainqueurs ni vaincus, ou plutôt tous vaincus, c’est-à-dire tous saignés, tous épuisés : tel sera le bilan de cette folie guerrière. Les classes dirigeantes peuvent ainsi constater la vanité de leurs rêves de domination impérialiste. […] Vos gouvernements vous disent qu’il faut continuer la guerre pour tuer le militarisme. Ils vous trompent. Le militarisme d’un peuple ne peut être ruiné que par ce peuple lui-même. Et le militarisme devra être ruiné dans tous les pays. Vos gouvernements et vos journaux vous disent encore qu’il faut prolonger la guerre pour qu’elle soit la «dernière guerre ». Ils vous trompent toujours. Jamais la guerre n’a tué la guerre. […]
Et ils en profitent pour continuer et même accentuer contre vous leur lutte de classe, tandis qu’à vous ils prêchent « l’union sacrée ». Ils descendent même jusqu’à exploiter vos misères et vos souffrances pour essayer de vous faire trahir vos devoirs de classe et de tuer en vous l’espérance socialiste. L’injustice sociale et le système des classes sont encore plus visibles dans la guerre que dans la paix. Dans la paix, le régime capitaliste ne dérobe au travailleur que son bien-être ; dans la guerre, il lui prend tout, puisqu’il lui prend la vie. […] »
Cent huit ans après les bruits de bottes cloutées, l’odeur de la poudre recouvrent toujours le monde. Il n’est pas un continent où l’on ne détruise physiquement l’étranger, « l’autre ». Les bombes pleuvent sur des populations pour faire tomber des despotes mis en place et armés par les défenseurs d’un ordre nouveau. Le présent rejoint le passé, le commerce des armes, la spéculation sur les produits agricoles et énergétiques alimentent les mêmes comptes bancaires des « profiteurs de l’arrière », les marchands d’armes et les capitalistes comme le dénonçaient les soldats de 14-18. Aujourd’hui encore les destructions, les pillages, les massacres de populations, la liquidation des conquêtes sociales sont à l’œuvre au nom et à cause du profit, du capital.
Lequel d’entre nous n’a pas ressenti ces images de morts, de destructions, de populations fuyant la guerre, au Yemen, en Palestine, en Ukraine, en Afrique… comme un possible futur pour nous-mêmes ?
Amis, Citoyens, Compagnons, Camarades,
Les forces qui poussent à la guerre aujourd’hui sont plus importantes que jamais, ainsi la présidente de l’Union européenne, Ursula Van der Leyen, qui s’oppose à un cessez le feu en Ukraine, un Joe Biden qui qualifie l’Europe de l’Ouest de « territoire de l’Otan », un Poutine qui affirme que le peuple ukrainien et le peuple russe ne font qu’un et envahit l’Ukraine. Jacques Prévert avait raison : « Quand la guerre vient, toute l’intelligence est dans le clairon ».
Le CLP-KVD rappelle son engagement contre le militarisme et réaffirme le principe fondamental du droit des peuples à disposer d‘eux-mêmes et non du droit des puissants à disposer des peuples. Il dénonce le droit d’ingérence qui n’est que le maintien de l’oppression coloniale ou impérialiste. S’opposer à l’horrible folie de la guerre, ce n’est pas être anti-ukrainien, ce n’est pas être pro-russe : c’est du bon sens. Les travailleurs n’ont rien à gagner avec cette guerre mais tout à y perdre !
Qui peut nier qu’aujourd’hui comme hier, la nécessité de la lutte contre la guerre ?
Le libre penseur Victor Hugo qui présida le premier Congrès de la Paix en 1849 écrivait: « Les nations ont au-dessus d’elles quelque chose qui est au-dessous d’elles, les gouvernements. […] la civilisation est dans les peuples, la barbarie est dans les gouvernants. […] .» En effet, plus que jamais, le pacifisme est l’affaire des peuples, des classes ouvrières avec leurs organisations démocratiques. Pour nous, libres penseurs, pacifistes internationalistes, nous faisons nôtre les mots d’Eugène Debs selon qui « il n’est qu’une guerre légitime, à savoir celle des pauvres contre les riches ».
La liberté de pensée, que nous prônons, nécessite le rassemblement de tous ceux qui, n’ayant ni partie liée avec les fauteurs de guerre ni la soumission comme guide, définissent par eux-mêmes où ils doivent diriger leur pas.
N’y a-t-il pas urgence à concrétiser cette volonté commune de désir de paix, ce refus du chaos imposé par les « puissants » !
C’est parce que nous honnissons les guerres que nous saluons ceux qui refusent de se battre pour des intérêts qui ne sont pas les leurs, de tuer l’autre, que nous réclamons, aujourd’hui encore, en ce 11 novembre 2022, la réhabilitation collective des fusillés pour l’exemple de 14/18.
La meilleure façon d’honorer les morts de 14/18 est de rappeler qu’ils sont morts pour crier la paix dans le monde.
Ainsi, nous pouvons le dire haut et fort :
Guerre à la Guerre !
Guerre à toutes les guerres !
La paix partout et maintenant !
Bruxelles, 8 novembre 2022
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