« Deux mondes sont en présence […] l’un est le monde du passé, de l’ignorance, du privilège, de l’abus, de la honte. L’autre est le monde de l’avenir, de la science, de l’égalité, de la justice, de l’honneur »
Paschal Grousset, le 23 mars 1871
Les Versaillais ont une postérité
Elle a beau avoir 150 ans, la Commune de Paris suscite toujours les passions, et sa mémoire reste conflictuelle. En février, au Conseil de Paris, la mise au vote d’une subvention à l’association les Amis de la Commune, destinée aux événements imaginés par la mairie autour de cet anniversaire, a provoqué une passe d’arme entre la majorité et l’opposition. Tandis que Laurence Patrice, adjointe PC chargée de la mémoire, proposait de célébrer « la révolution la plus moderne » qui soit, elle s’est attiré les foudres de Rudolph Granier, élu de la droite « républicaine » dans le 18e arrondissement – lequel a estimé qu’on ne devait pas « danser au son des meurtres et des incendies ». « Il y a plusieurs Commune, un versant généreux et patriotique, mais aussi un autre visage, plus sombre de crimes et de violence », a abondé le conseiller de Paris David Alphand (collègue de Granier), réclamant un « droit d’inventaire » pour ces 72 jours qui ont ébranlé Paris.
Cent cinquante ans après, la Commune de Paris continue de révulser quelques élus et intellectuels de droite. L’historien Pierre Nora est de ceux-là. Invité le 4 mars dans le grand entretien de France Inter, il n’a pas caché son hostilité à toute commémoration de cette expérience révolutionnaire. « Oui Napoléon, non la Commune! », a lâché l’académicien en réponse à Léa Salamé qui lui demandait s’il fallait commémorer le bicentenaire de la mort de Napoléon et la Commune de Paris.
Le préfet d’Ile-de-France avait décidé d’inscrire la basilique du « Sacré Cœur »au rang de monument historique à l’été 2021. Ce bâtiment a été édifié à partir de 1877 sur la butte de Montmartre, lieu qui a été le théâtre de la répression sanglante qui a mis fin à la Commune quelques années plus tôt. Le gouvernement, par la voix de la ministre de la Culture Roselyne Bachelot, s’en était même félicitée. Cet acte éminemment politique est le « deuxième assassinat de la Commune de Paris ».
« Ce ne sont pas des pierres que l’on protège de l’usure du temps, c’est un message qui se perpétue : La Commune de Paris est impie, elle doit payer pour ses fautes, la Basilique, c’est la rédemption revendiquée. » (1)
Un nouvel élément est venu susciter la « levée de boucliers d’une droite très conservatrice, catholique, qui n’a jamais oublié la Commune » : le report à 2022 du classement aux monuments historiques du Sacré-Cœur…
Macron, héritier des Versaillais
Dans le documentaire publié sur France 3, Emmanuel Macron évoque sa réception de Vladimir Poutine à Versailles. Propension monarchique, lui suggère-t-on ? En aucun cas, répond-il : « Versailles, c’est là où la République s’était retranchée quand elle était menacée » […] Ces dernières semaines, face aux manifestations du peuple français, Macron a du annuler la réception à Versailles pour recevoir le futur roi d’Angleterre.
Pourquoi je ne célébrerai pas
la commune de Paris !
La Commune est-elle un « laboratoire d’idées inédites, en pleine résonance avec les débats contemporains » comme l’affirment ses laudateurs ? […] Les choses dégénèrent entre le gouvernement républicain légal replié à Versailles et les mutins de la capitale. L’Assemblée versaillaise supprime la solde des gardes nationaux, ressource de beaucoup de familles, et les délais de paiement accordés aux locataires.
L’application de ces dispositions, pour le moins maladroites, réduirait à la misère la plupart des salariés, boutiquiers et artisans parisiens. Deux généraux sont assassinés par les communards, faisant dire à Clemenceau : « J’ai observé le phénomène pathologique qu’on pourrait appeler le délire du sang. Un souffle de folie paraissait avoir passé sur cette foule ». Des prisonniers communards sont fusillés. La Commune instaure par décret la terreur et prend des otages… D’un côté comme de l’autre, c’est le règne de la violence et de la barbarie. Ce que Georges Sand qualifiera de « saturnales de la folie ». Nous sommes loin, très loin de la liberté, de l’égalité et de la fraternité affichées aux frontons…
Joseph Thouvenel, Président de la CFTC-Paris
Hier : la féroce désapprobation des bourgeois…
« Sauvé, sauvé ! Paris était au pouvoir des nègres ! » Alphonse DAUDET au moment de la répression versaillaise…
FLAUBERT, l’un des écrivains les plus virulents, dans une lettre à George SAND, également férocement anti-communarde… : « Le peuple est un éternel mineur. Je hais la démocratie. […] Le premier remède serait d’en finir avec le suffrage universel, la honte de l’esprit humain. […] L’instruction obligatoire et gratuite n’y fera rien qu’augmenter le nombre des imbéciles. Le plus pressé est d’instruire les riches qui, en somme, sont les plus forts. »
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