Les guerres, le pillage systématisé des ressources des pays d’Afrique, du Proche et Moyen-Orient, par les multinationales à la recherche insatiable du profit, ont provoqué et provoquent, entre autres conséquences effroyables, l’exode de millions de femmes, d’enfants et d’hommes qui n’ont d’autre « alternative » que de prendre le chemin de l’exil au péril de leur vie.
Il ne se passe pas une semaine sans qu’un bateau de « migrants » en direction de la Grande-Bretagne coule, engloutissant des vies. A chaque fois, les gouvernements accusent les passeurs, les mafias. Oui, les passeurs sont des criminels, mais les responsables ce sont les gouvernements et l’Union européenne !
La Grande-Bretagne et la France ont passé un accord qui signifie que la police française doit faire le travail de la police britannique et empêcher le passage « sécurisé » des « migrants » vers la Grande-Bretagne. L’accès au port de Calais et le tunnel sous la Manche sont totalement bloqués par la police française. Ce qui fait que les « migrants » traqués tentent d’accoster les côtes anglaises à partir des côtes picardes et normandes. Les risques de chavirement et de noyade s’en trouvant ainsi démultipliés.
Il faut que la figure de l’oppresseur soit incarné désormais par les anciens colonisés…
Si en 2016, il a été fait beaucoup de publicité à l’accord de 2016 avec le président turc Recep Tayyip Erdoğan pour qu’il retienne sur son sol les réfugiés syriens, l’UE a été beaucoup plus discrète, et opaque, à propos d’un vaste projet dénommé Initiative pour la route migratoire UE-Corne de l’Afrique, communément appelée « processus de Khartoum » (1).
Les polices marocaine et espagnole agissent de concert pour réprimer dans le sang les « migrants » coincés entre les barbelés de Ceuta et Melilla.
L’Union européenne vient de signer un nouvel accord avec les gouvernements du Soudan, de la Libye, du Maroc, de la Tunisie, etc. qui délègue à ces pays la traque et le blocage des « migrants » africains sur leurs territoires, pour les empêcher d’atteindre l’Europe et pouvoir demander le droit à l’asile (2). En Libye, au Soudan, ils sont réduits à l’esclavage, frappés, emprisonnés ou tués. En Tunisie, le gouvernement expulse les « migrants » en les abandonnant dans le désert de Libye, sans eau, sans nourriture (3).
Chaque jour, des « migrants » se noient. Selon les chiffres officiels de l’Union européenne, 2 000 personnes sont mortes noyées en 2022. 20 000 depuis 2014. Ces chiffres sont contestés par les ONG, car l’Union européenne ne tient compte que des personnes dont les corps ont été repêchés, quand des milliers d’autres ont disparu au fond de la mer.
Selon les besoins économiques, géopolitiques du moment…
Durant les années 80, les boat-people du Vietnam, du Cambodge… se voyaient accordés automatiquement le statut de réfugiés sur base de leur nationalité. Au même moment, les Zaïrois fuyant le régime dictatorial de Mobutu étaient systématiquement rejetés… Il est vrai que le Zaïre possède d’énormes richesses et qu’il faut rester en bons termes avec le dictateur. Ces exemples pourraient être multipliés.
On comprend mieux que les Ukrainiens fuyant la guerre soient qualifiés, par l’U.E., les gouvernements européens, les médias, de réfugiés – ce que nous approuvons – alors que ceux qui fuient les mêmes causes en Afrique, en Extrême et Moyen-Orient… soient étiquetés comme « migrants ». Les malheureux russes contraints à l’exil seront-ils considérés comme des réfugiés ou des migrants ? Il se trouvera, n’en doutons pas, d’éminents juristes spécialistes du droit international, ayant leur rond de serviette sur les plateaux télévisés, qui sauront répondre à cette question…
Le traitement discriminatoire des « migrants » aux frontières, leur refoulement, leur enfermement dans des camps insulaires et leur déportation sont complétés par une politique et des discours racistes. Qualifier les migrants de clandestins et d’ennemis qui violent les frontières est une infamie contre l’humanité et la vie.
En Belgique, comme dans tous les pays « développés », c’est cyniquement au nom de « la défense du droit d’asile » que les gouvernement successifs justifient leurs politiques migratoires et profitent dans la foulée pour piétiner, laminer le droit d’asile lui-même. Les politiques migratoires n’ont rien à voir avec les droits de l’Homme, mais bien avec le système capitaliste prédateur et oppresseur.
Ces êtres sur les routes de l’exil, ne sont pas des « migrants », ce sont des réfugiés qui fuient les guerres, la famine, la misère. Ce sont les Grecs qui, dans l’Antiquité, ont défini la notion d’asulon. “Asile” vient du grec “asulon” (formé de “a” privatif et de “sula”, « butin », d’où le sens de « qui ne peut être pillé, inviolable, sacré ».
Pour la défense du droit d’asile !
Bruxelles, 25 août 2023
______________________________________
(1) Les 9 pays de l’Afrique orientale : Djibouti, Égypte, Éthiopie, Érythrée, Kenya, Soudan, Soudan du Sud, Somalie, Tunisie signataires ont été rejoints par la Libye et l’Ouganda.
(2) Le droit d’asile n’est considéré par les Etats membres de l’Union européenne qu’à la condition que la personne soit entrée dans un pays membres.
(3) L’Union européenne et la Tunisie ont signé, dimanche 16 juillet, un protocole d’accord pour un « partenariat stratégique complet » portant sur la lutte contre l’immigration irrégulière (sic). L’autocrate Kaïs Saïed a qualifié cet accord comme un « rapprochement entre les peuples ».
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.