L’objectif : chasser encore plus les immigrés, les réfugiés
« Il (le peuple français) donne asile aux étrangers bannis de leur patrie pour la cause de la liberté. » – « Il le refuse aux tyrans. » Article 119 et 120 de la Constitution française de 1793.
Les réfugiés victimes du pacte abject, honteux de l’Union européenne !
Nous avions par le passé voir ici et là, avec d’autres, dénoncé et condamné le marchandage honteux de l’Union européenne, sous-traitant sa politique de rejet, de refoulement des réfugiés, avec la Turquie. Notre condamnation de cet accord trouve sa tragique justification avec sa duplication avec la Libye, le Maroc, l’Albanie, la Tunisie… et le nouveau « pacte pour la migration » de la Commission européenne qui va encore plus loin dans l’abject, dans le non-respect des droits fondamentaux des réfugiés… des êtres humains. La réaction au pouvoir, continue à faire des réfugié·es des migrant·es, des boucs émissaires de la crise.
Il s’agit bien d’une submersion ! Celle des réfugiés dont les os blanchissent au fond des mers !
Alors que les morts s’entassent par dizaines de milliers au fond des mers du Sud et du Nord, dans le Sahara et que l’amour des murs et des barbelés est devenu une passion des gouvernements et de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, en septembre 2024, a présenté un nouveau « pacte pour la migration ». Jugé contraire au droit international, il a été rebaptisé « Pacte contre les migrations » par les organisations de défense des droits de l’Homme. En avril et mai 2024, le Pacte sur la migration et l’asile, censé améliorer les modalités d’entrée et de répartition des migrants au sein de l’Europe, était adopté par Parlement européen et par le Conseil européen.
Objectif annoncé : en finir avec l’accord de Dublin qui stipulait que le pays d’entrée des réfugiés était le seul responsable de l’instruction de leurs dossiers de demande d’asile. L’incendie du camp de Moria (ici), dans l’île grecque de Lesbos et la mort de 650 personnes migrantes au large de Pylos, ont été le prétexte pour mettre fin à ce dispositif. Désormais, chaque pays de l’Union européenne devrait participer à l’effort de répartition, de traitement des requêtes, ou des retours.
Chantage et externalisation
Mais en réalité, c’est de « retours des réfugiés » et d’externalisation – en langage normal, il s’agit d’expulser les réfugiés, qui ont survécu à l’enfer vers des pays qu’ils ne connaissent pas – dont il est question dans le plan de la Commission européenne et non d’accueil des réfugiés. Le vice-président de la Commission, inspirateur de ce pacte, le Grec Margaritis Chinas, chargé de la promotion de notre mode de vie européen (sic), est très clair quand il résume ainsi la proposition de la Commission : il y a « d’abord une dimension externe beaucoup plus forte et des accords avec les pays d’origine et de transit, les obligeant à collaborer davantage et à favoriser le maintien de leurs ressortissants sur leur territoire » (Le Monde du 24 septembre 2020)
On ne peut être plus clair sur ce dont il s’agit : un chantage doublé de pressions exercé à l’encontre des pays d’où viennent les réfugiés, ou qui y transitent, pour faire eux-mêmes le sale boulot.
L’objectif, comme le rapporte cyniquement Clément Beaune, secrétaire d’État français aux Affaires européennes, est d’augmenter à tout prix les retours, et ce au détriment des droits des réfugiés : « Il y a beaucoup de pays avec lesquels l’Europe commerce, que l’Europe soutient par de l’aide au développement, par une présence en matière de sécurité et qui aujourd’hui n’acceptent pas de reprendre le moindre ressortissant dans le cadre de reconduites. Cela n’est pas acceptable, je crois qu’on a les moyens, même si c’est difficile, bien sûr, de changer cela, de mettre parfois plus de pression. » (La Croix du 23 septembre 2020)
Une politique des États et de l’Union européenne de plus en plus brutale et bafouant les droits de l’Homme et les conventions internationales.
Dans une déclaration commune d’universitaires européens, le philosophe Étienne Balibar pointe comment les gouvernements européens « organisent cette élimination meurtrière » en empêchant les boat-people d’aborder les côtes de l’Europe et en parquant les survivants dans des « camps de regroupement » et dénonce « Leur (gouvernements des pays de l’U.E.) concurrence dans la lâcheté et la cruauté est une complicité, c’est une volonté qui ne s’avoue pas mais qui se met en œuvre. Or cette complicité et cette volonté, usurpant les noms de politique et de droit, ne règlent strictement rien : ni les questions de flux de populations, ni les questions de droit international… ».
Le gouvernement belge n’échappe pas à ce constat et participe même avec un zèle assumé à cette concurrence dans la lâcheté. L’empressement de Nicole De Moor (3), Secrétaire d’Etat à l’Asile et la Migration, à publier son code de la migration contrôlée est notamment dû au scandale de l’accueil des réfugiés en Belgique. Les personnes qui arrivent ne sont pas prises en charge et se voient refuser la protection qu’elles sont en droit d’avoir, elles se retrouvent à la rue avec tous les problèmes de santé et de violence que cela implique.
La Belgique a d’ailleurs été condamnée à plusieurs reprises par la justice belge pour sa politique de non-asile : « Il est suffisamment démontré qu’à plusieurs reprises, des personnes empêchées de présenter leur demande de protection internationale, ont passé la nuit dehors, par des températures négatives et sans soins ni aucune prise en charge par les autorités compétentes, de sorte que la violation du droit à une vie digne est, prima facie, établie » (1). Dernière condamnation en date par la Cour européenne des droits de l’homme, une condamnation en juillet 2023, pour « conditions d’existence inhumaines et dégradantes » des demandeurs d’asile et pour « refus caractérisé » des autorités « de se conformer aux injonctions du juge interne« (2).
Raison pour laquelle le gouvernement belge, avec la Commission européenne, veulent maintenant passer à une autre phase : accélérer les expulsions des réfugiés.
Détenir, trier, expulser
C’est ce qu’on lit de manière un peu plus diplomatique que les propos de C. Beaune dans le communiqué officiel de la Commission européenne qui parle « d’un renforcement de la coopération avec les pays tiers aux fins de retours rapides ». Et toujours dans ce communiqué, on apprend « qu’un rôle renforcé (sera) attribué au corps européen de gardes-frontières et de gardes-côtes, avec un nouveau coordinateur de l’UE chargé des retours » (La Croix du 23 septembre 2020). Frontex voit son budget, son personnel, son arsenal militaire, son autonomie et ses zones géographiques augmenter malgré les nombreuses accusations et plaintes auprès des tribunaux à son encontre pour non-respect des droits humains dont le droit d’asile et de secours en mer (Ici et Là).
Ils osent tout, c’est à cela qu’on les reconnaît : « La Commission lancera des partenariats destinés à attirer des talents avec des pays tiers clés, qui assureront une adéquation entre main-d’œuvre et besoins de compétences dans l’U.E. » (Commission européenne) C’est sans ambiguïté, ce Pacte va organiser la fuite des cerveaux des pays du Tiers Monde et ouvre la chasse des réfugiés qui n’intéressent pas le capital.
Ces derniers mois, le pape François a lancé un appel réaffirmant la charité chrétienne et un avertissement aux pays européens pour plus de tolérance et d’accueil. Le problème est, que bon jésuite, il évite soigneusement de parler du fond, des raisons économiques et politiques de l’afflux des migrants et des responsabilités des gouvernements et des trusts qui ont pillé et pillent encore aujourd’hui les pays africains, pour ne citer qu’eux. « Il reste que la charité, quels qu’aient été sa valeur, ses effets réels et sa force d’intégration communautaire, souffre d’un défaut moral essentiel : son champ d’application se restreint aux rapports interindividuels qu’elle veut améliorer, il est vrai, mais jamais elle ne s’étend aux rapports sociaux pour les critiquer et les transformer en y incarnant son message d’amour. De ce point de vue elle est le contraire de la justice » (4).
Ursula van der Leyen, Charles Michel, Meloni, Bart De Wever, Bouchez, Macron et leurs semblables parlent de l’Union Européenne comme d’un projet humaniste alors qu’ils sacrifient la vie d’êtres humains.
Ce Pacte prône une approche réactionnaire, les réfugiés y sont vus comme un danger ! En violation du droit d’asile et du principe de non-refoulement, le Pacte traduit l’obstination de l’U.E. à mépriser les droits fondamentaux des réfugiés. Il entérine une grave régression des droits fondamentaux des réfugiés et à fortiori des nôtres.
Oui, il s’agit bien d’une submersion ! Celle des réfugiés dont les os blanchissent au fond des mers ! Celle de l’Humanité.
Nous sommes pour notre part du côté des bénévoles et non du côté des matraques et des plumitifs qui les légitiment, qui plus est, au nom de l’Humanité qu’ils souillent de leur chauvinisme. Nous sommes du côté de toutes et ceux qui aident les réfugiés et non du côté de ces gardes-frontières bien logés et bien nourris.
La guerre contre les réfugiés
est une guerre contre l’Humanité !
Bruxelles, 1er février 2025
Fructidor CCCXXXII
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1. https://www.liguedh.be/deni-daccueil-un-pitoyable-anniversaire/).
2. https://institutfederaldroitshumains.be/fr/crise-de-laccueil-leurope-pointe-a-nouveau-les-manquements-de-la-belgique
(3) Nicole de Moor (Secrétaire d’État à l’Asile et la Migration, CD&V) a demandé la révocation du statut de réfugié de Mohammed Khatib, un réfugié politique palestinien fortement impliqué dans la lutte en soutien à la résistance palestinienne.
4. Quiniou, Yvon, Critique de la religion : une imposture morale intellectuelle et politique . La Ville brûle, 2014. p.191.
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