Laïcité dans l’Enseignement supérieur ou laïcité de l’Enseignement supérieur ?
L’engagement des forces armées françaises dans les conflits, qui se poursuivent en Afrique et au Moyen-Orient, risque bien de poser la question du terrorisme et de ses vecteurs sur le territoire national de façon durable. C’est dans ce contexte que plusieurs forces politiques sont entrées en campagne pour faire modifier la législation française dans de nombreux secteurs. A l’Université, il s’agirait de revenir sur les Franchises universitaires pour autoriser la chasse aux comportements vestimentaires religieusement ostentatoires : voiles, vêtements.
Rappelons que les Franchises universitaires sont des libertés fondamentales pour les étudiants et les enseignants. Elles ont été arrachées de haute lutte contre le pouvoir royal et le clergé. Elles sont communes au monde universitaire dans le monde entier. Seuls les totalitaires les ont remis en cause : Franco en Espagne, les Colonels en Grèce et Raymond Marcellin en 1968 à Paris. Ceux qui revendiquent la disparition des libertés universitaires sont donc en bien curieuse compagnie.
En réalité, il s’agit bien évidemment de s’en prendre au « prosélytisme islamique », sans le dire tout à fait, c’est-à-dire d’accorder crédit au fantasme qui entoure les jeunes filles voilées. A cela s’ajoute aujourd’hui une campagne délirante contre le port de jupes longues « qui serait aussi du prosélytisme islamiste ». Jupiter, décidément, rend fous ceux qu’il veut perdre. Dans la Grèce des colonels, on interdisait les mini-jupes, dans la France de Hollande/Sarkozy, on va interdire les jupes longues ?
Le gouvernement a-t-il aussi un point de vue sur la couleur des chaussettes que l’on peut mettre ou pas pour ne pas être taxés d’islamo-fascistes ?
L’Enseignement supérieur est un lieu de confrontations intellectuelles et la liberté y est de mise. Il appartient dès lors à chaque université de créer les conditions pour faire respecter les conditions d’un enseignement et d’une recherche sereins, à l’abri des dogmes et des comportements incivils, sous la conduite d’universitaires dont l’indépendance est garantie par leur Statut. Aucune catégorie de citoyennes et de citoyens, étudiant à l’université, ne devrait être soumise à un statut d’exception. Les principales organisations syndicales de salariés de l’Université sont fermes sur ce point et rejoignent les préoccupations de la Libre pensée.
En revanche, la laïcité de l’Enseignement supérieur est un sujet de préoccupation légitime. L’accord Vatican/Kouchner a permis aux Instituts catholiques de délivrer des diplômes universitaires, alors même que leur mode de fonctionnement et d’enseignement est régi par des principes dogmatiques qui bornent l’esprit scientifique. Un nouveau pas vient d’être franchi avec les COMUE (Communautés d’Universités et d’Etablissements) qu’une loi de 2013 rend obligatoires et qui ont vocation à intégrer les « Universités catholiques » et leurs facultés de théologie. Gageons que, dans ce contexte, la théologie, rebaptisée « éthique », ne manquera pas de s’intéresser au contenu des enseignements scientifiques et aux programmes de recherche.
Là est le véritable danger : que des considérations religieuses limitent la liberté des universitaires ou des étudiants. Et le Premier ministre ajoute à la menace lorsqu’il propose que les universités participent à la formation des imams, légitimant ainsi le processus de désintégration de la laïcité de l’Enseignement supérieur.
La Libre Pensée demande :
– l’abrogation du Décret 2009-427 du 16/04/2009 !
– le respect intégral des Franchises universitaires !
– le retour au monopole de l’Université républicaine de la collation des grades !
– la non mise en place des COMUE prévues par la loi 2013-660 (loi Fioraso) !
Paris, le 7 mai 2015
FÉDÉRATION NATIONALE DE LA LIBRE PENSÉE
Membre de l’Association Internationale de la Libre Pensée (AILP)
10/12 rue des Fossés-Saint-Jacques 75005 PARIS – Tél : 01 46 34 21 50 – Fax : 01 46 34 21 84
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